Du 12 au 14 décembre derniers s’est tenu le « traditionnel » Conseil des Ministres de fin d’année au cours duquel sont fixés les TAC et quotas pour l’année suivante. Traditionnel ? Pas tant que ça pour cette édition 2021 car dans le contexte post-Brexit, le Conseil des Ministres ne décide plus que des niveaux de TACs pour les seuls stocks communautaires. De plus, le 22 décembre, un accord a été trouvé entre l’UE et le Royaume-Uni quant au niveau de TAC des stocks partagés.

Autant le dire en préambule, les perspectives de possibilités de pêche que nous serons amenés à gérer en 2022 ne sont pas bonnes.  Un des seuls points positifs dont nous pouvons nous réjouir est le fait que tous les TAC ont été fixés, et que nous disposerons, a contrario de l’an dernier, assez rapidement de nos opportunités de pêche définitives. Cette meilleure visibilité devrait permettre la réalisation d’échanges de quotas plus rapidement mais pas forcément plus facilement !

Lors du Conseil d’Administration de l’OP du 22 décembre, un tour d’horizon des décisions prises, ou en passe de l’être,  concernant les niveaux de TACs a précédé l’adoption des plans de gestion encadrant l’activité de nos adhérents. Malheureusement, ce tour d’horizon a vu de manière inédite la présentation de baisses des possibilités de pêche quasi systématiques.

Ainsi, à l’exception des stocks de baudroies et de cardine VII – VIII qui connaitront de légères augmentations, et un statu quo pour le lieu jaune VIII, pour tous les autres stocks, ce sont des baisses de quotas qui seront appliquées.

Dans ce contexte morose, la langoustine du golfe s’en tire bien, avec une baisse limitée à 2% conformément à l’avis scientifique. Mais d’autres baisses de TAC s’annoncent d’ores et déjà sensibles pour les activités de nos adhérents :

  • Nouvelle baisse de 2,7%, pour les raies VII alors qu’en 2021 nous avions déjà été tenus de réaliser un important volume d’échanges pour couvrir les captures réalisées ; échanges que nous ne sommes pas certains de pouvoir renouveler en 2022.
  • Baisses de 9,6% pour le maquereau et 12,6% pour les chinchards.
  • Baisse du de 24% pour la sole VIIhjk au titre d’une approche de précaution dévoyée, alors que les rendements en mer ont augmenté de manière significative depuis 1 an et demi.
  • Baisse de 18% pour la lingue franche pour 2022, avec une diminution déjà actée de ce même niveau pour 2023.
  • Baisse de 24%, pour le lieu noir VI qui sera en outre amplifiée par les nouvelles cessions à réaliser auprès du Royaume-Uni, et impliquera une baisse réelle du quota français de 31%.
  • Nouvelle baisse de 20% pour le cabillaud de Mer Celtique entrainée par une logique de préservation dogmatique de la Commission Européenne. Le niveau du TAC n’est plus que de 644 tonnes soit une baisse de 80% en 5 ans !
  • Baisse de 20% pour le merlu VI-VII-VIII.
  • Baisse de 37% pour la sole du golfe de Gascogne, actée dans un cadre que nous n’avions jamais rencontré : malgré la sensibilité de ce stock, et les impacts socio-économiques potentiels, aucune atténuation n’aura pu être obtenue par la France lors du Conseil des Ministres.

La décision prise pour le stock de sole du golfe de Gascogne résume assez bien à nos yeux l’état de fonctionnement de ce processus de fixation des TACs et Quotas. D’une part, les promesses que l’on nous avait faites de la gestion au Rendement Maximal Durable – perspective d’opulence des ressources – ne sont pas tenues. D’autre part, au gré du Brexit et de l’inexorable renforcement du poids politique de la CommissionEuropéenne dans la prise de décision, la capacité d’action de nos pouvoirs politiques s’est considérablement érodée.

Depuis le Brexit, on peut véritablement s’interroger sur le processus de prise de décision concernant les TAC. L’intérêt même du Conseil des Ministres de fin d’année pose question sur la défense réelle des dossiers. Le sentiment partagé d’un éloignement de la prise de décisions et de la perte d’influence des Etats membres dans cette double négociation (UE/UK et UE/Etats membres) souligne la nécessité de revoir la méthode et l’anticipation des difficultés afin de sortir de la politique du fait accompli de la Commission Européennequi ne tient pas compte de nos arguments y compris scientifiques en les balayant avec des argument juridiques soumis à interprétation. 

 

Yves Foëzon directeur de Les Pêcheurs de Bretagne