Le Plan d’Accompagnement Individuel Brexit (PAI) marquera un tournant dans l’histoire récente des pêches françaises. Depuis plusieurs semaines chacun fait ses comptes à l’échelle de son territoire (port, département, région…). La flottille des adhérents LPDB sera de loin la plus impactée au niveau national : 30 à 35 navires, tous chalutiers hauturiers ou pélagiques.
Ce n’est pas une surprise, le plan était annoncé depuis la venue de la Ministre Annick Girardin à St-Quay-Portrieux en janvier 2021, au lendemain de la signature de l’accord Brexit. Et au regard du contexte économique, de l’âge des navires, des contraintes réglementaires qui se multiplient etc… cette issue était inéluctable. Sans rétablissement significatif de la conjoncture, d’autres entreprises de pêche pourraient rencontrer très rapidement de fortes difficultés économiques.
Certaines incertitudes demeurent encore du fait d’une part de désistements de certains navires qui pourraient permettre à quelques-uns de rentrer dans l’enveloppe financière des dossiers retenus ; d’autre part certains armateurs cherchent encore d’autres alternatives à la casse de leur navire car cette décision demeure lourde de conséquences pour eux.
Dans les prochaines semaines, lorsque la liste définitive des navires partant à la casse sera connue, le Conseil d’Administration de l’OP devra étudier les conséquences de cette brusque accélération d’un phénomène déjà à l’œuvre depuis plusieurs années et analyser les conséquences sur la consommation des quotas, les droits de pêche gérés par l’organisation, la baisse de production, les équilibres portuaires.
D’un côté les navires qui partent ne consommeront plus les quotas qu’ils avaient l’habitude d’exploiter ; cela peut éventuellement libérer des capacités à redistribuer aux navires qui restent ou bien cela peut rendre moins sensible la dépendance à certains échanges de quotas. En effet les échanges peuvent parfois représenter une part très importante des quotas consommés par les adhérents LPDB ; or ces échanges ne sont jamais garantis ni pérennes, et dans certains cas nous devons déjà malheureusement anticiper leur nette diminution. Ainsi les quotas « libérés » par les navires du PAI Brexit pourront parfois à peine compenser la baisse de certains échanges…
De l’autre côté, les antériorités des navires du PAI Brexit vont retourner à hauteur de 30% à la réserve nationale ; nous n’avons aucune visibilité sur les modalités de redistribution de cette réserve par l’État…
Ces pertes d’antériorités et donc de quotas pourraient représenter :
- Jusqu‘à près de 1000t de lotte (sur 3 quotas distincts : zone VII, VIII et VI),
- 500t de merlu (sur 2 quotas différents), 400t de lingue bleue,
- 300t d’églefin ou de cardine,
- etc…
Comme on le comprend, il faudra établir à chaque fois une évaluation de la situation post-PAI en tenant compte d’une moindre consommation (navires en moins) mais aussi d’un quota réduit avec la perte de 30% des antériorités.
Sur la grande majorité des exemples cités, la consommation actuelle des sous quota LPDB n’était pas entière et l’accès à ces derniers par la plupart des navires adhérents LPDB se faisait sans restriction particulière (pas de plan de gestion annuel).
Par exemple, pour le quota de lotte en zone VIII, consommé à hauteur de 40% seulement en 2022, le bilan passerait (sous hypothèse d’un maintien du TAC !), à environ 35% de consommation.
Une première analyse montre qu’assez peu de changements sont à attendre :
- Là où il existe une forte tension sur la consommation des quotas (sole VIII, sole VIIhjk, sole VIIfg, cabillaud, dorade rose etc…), le départ, même massif de chalutiers hauturiers, ne modifiera quasiment rien. Les quotas consommés par les navires sortants étaient, par la force des restrictions déjà existantes, peu élevés et leurs antériorités assez faibles…
- Là où nous avions déjà d’importants reliquats de quotas non consommés (lotte, églefin…), les navires restant en activité continueront à pouvoir les pêcher sans restriction mais sans « bonus » non plus.
Précisons enfin que les autorisations de pêche (ANP/ AEP) des navires sortants au PAI Brexit seront retirées du contingent national conformément aux dispositions du Code Rural.